MiniReview: "À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie" de Hervé Guibert

La couverture d'une des éditions du livre, avec un auto-portrait (Guibert était aussi photographe) pris en 1987. Il a reçu son diagnostic du VIH en janvier de l'année suivante.

 Qu’est-ce que c’est?

Un mémoire écrit par l’écrivain français Hervé Guibert, publié en 1990.

 

Le sujet?

La première phrase donne le ton : « J’ai eu le sida pendant trois mois. »

C’est l’histoire du sida dans la vie de Guibert, premièrement en ce qui concerne son ami Muzil (le philosophe Michel Foucault en réalité) et, plus tard, sa propre maladie.

 

Franchement, John, encore une fois, c’est le sida! Est-ce qu’il y a quelque chose de nouveau dans ce livre?

Oui, c’est un sujet qui ne cesse pas d’inspirer des récits intéressants. Ce qui fait intéressante l’histoire racontée ici, c’est le fait que parmi les amis de Guibert, il y a un américain qui s’appelle Bill dans le livre, qui est un scientifique qui figure parmi les plus hautes instances d’une entreprise pharmaceutique qui recherche un vaccin contre le sida. Donc, en même temps que Guibert décrit ses symptômes et sa peur de la maladie, et ses préparatifs pour une suicide à un moment ou il décidera que tout espoir est illusoire, en même temps que tout cela, son ami Bill lui parle de la possibilite imminente d’un vaccin. (Le titre du livre nous indique le résultat : le supposé vaccin ne se manifeste pas, et Bill se révèle un personnage hautement narcissique et douteux.)

 

On s’est déjà parlé d’un autre mémoire de Guibert. Comment se comparent-t-ils, ces deux?

J’ai beaucoup aimé Fou de Vincent, mais je dirais que celui-ci est encore mieux. Guibert est un si merveilleux écrivain, et ses descriptions de ses visites à l’hôpital pour des prises de sang, juste pour prendre un exemple, sont bourrées de moments mémorables, de petits détails riches en émotion. Et je dirais que je n’ai jamais lu un récit qui révèle à quel point une vie était bouleversée par un diagnostic du sida. Guibert partage comment le niveau de cellules T4 dans le sang peut devenir une obsession, les déchirements autour de prendre ou ne pas prendre des médicaments qui pourraient allonger la vie par quelques mois tout en rendant la vie insupportable, la question de quand prendre la décision de s’enlever la vie. C’est déchirant à lire. Le livre est, dans un certain optique, exactement le contraire du livre de Cyril Collard, ou on avait affaire avec un personnage décidé à vivre avec le sida, et pas de mourir avec. Dans le livre de Guibert, toute la vie après le diagnostic devient provisoire, une longue préparation pour la mort annoncée.

 

Je me dis que des étoiles sont inévitables?

Trois étoiles. Un chef-d’œuvre de la littérature du sida, écrit dans le magnifique langage d’Hervé Guibert. À relire ! 

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